La meilleure vidéo faite sur l’écriture de la thèse
Et comment cette vidéo à plus de 100 000 vues peut vous aider.(Liste des meilleurs conseils téléchargeables en fin d’article)
Est-ce que vous savez écrire une thèse ? C’est-à-dire : est-ce que vous connaissez les codes et attendus implicites qu’un jury va attendre de votre travail ? 🔍
Si vous vous attendez à devenir un ou une rédactrice hors-pair sans formation, préparez-vous à des mois et des mois de frustration, de doutes et de remise en question.
Mais ce n’est pas le pire…
Parce que contrairement à ce qu’on dit, il n’y a pas de “mystère” sur l’écriture de la thèse.
En d’autres termes, vous perdez des mois parce que vous ne connaissez pas certains conseils très utiles qui vous prendraient quelques heures à assimiler.
Ce blocage qu'on connaît tous
Que se passe t-il quand vous voulez rédiger ? 1/ Vous avez beaucoup de données, de théories et d’idées potentiellement fructueuses. 2/ Vous n’arrivez pas à traduire tout ça en propos clairs et concis. 3/ Si vous êtes dans cette situation, vous avez un problème de connaissance des attendus. C’est votre boussole : comment atteindre un objectif si on ne le connait pas clairement ?
Peu importe la qualité de votre travail : si vous ne formulez pas clairement vos idées, personne ne les comprendra.
Peu importe votre travail en amont : si vous n’êtes pas au clair sur ce que vous souhaitez démontrer, la rédaction ne suivra pas.
Alors comment rendre tout ce processus 10 fois plus fluide ? 🖋
La réponse est contenue dans une vidéo sur l’écriture de la thèse qui totalise plus de 100.000 vues. Énorme pour une vidéo d’une heure. Vous la connaissez peut-être, mais elle est nettement sous-exploitée.
Il s’agit de la vidéo “L’écriture de la thèse | Erreurs à éviter & conseils pratiques” du Professeur Frédéric Rouvière : https://www.youtube.com/watch?v=ee5KzWm11Bc&t=2s
Une vidéo tellement efficace qu’elle dépasse la frontière du droit et a servi à des étudiants de toutes les disciplines. Elle est devenue un classique dans le milieu de la recherche.
Cet article vous explique les principes identifiés par le Professeur Rouvière et vous montre comment les utiliser pour rédiger votre thèse de manière plus rapide, claire et efficace. Il s’agit quasi exclusivement d’une retranscription, ré-organisée par souci de clarté.
Sur l'objectif de la thèse
Le but de la thèse, c’est de trouver un problème. Pourquoi ? Parce que seul un problème ouvre une discussion. On va identifier un problème en introduction – la problématique – et toute la thèse va être une discussion de ce problème. Si on discute d’un problème, cela signifie qu’on a au moins le choix entre plusieurs réponses possibles, d’où le fait qu’il y ait un débat.
Ce qu’on appelle la problématique, c’est simplement la succession des problèmes que vous allez examiner pour résoudre votre problème principal.
La définition d’une problématique, c’est ça : Ensemble des problèmes qui se posent sur un sujet déterminé. 📖
D’ailleurs je pense que c’est un bon réflexe de penser comme cela : un problème c’est une question simple qui suggère une réponse. Une problématique, c’est une question à laquelle il est tellement compliqué de répondre, qu’il faut la découper en sous-problèmes avant de pouvoir y répondre.
Donc on identifie un problème complexe en introduction : la problématique. Pour trancher ce problème complexe, il va falloir examiner des sous-problèmes. Et ces sous-problèmes sont… les parties et les sous-parties.
Sur le processus de rédaction - comment avoir la certitude de bien faire à chaque étape ?
Le Professeur conseille de se poser plusieurs questions en chaque début de chapitre 🧐. C’est ÇA qui va donner du sens à l’ensemble et débloquer la rédaction.
Voilà ce qu’il dit :
– Commencez tous les chapitres par la même phrase : “l’objet de ce chapitre est de démontrer que…”
– Éventuellement rajoutez cette deuxième phrase: “l’enjeu de cette démonstration est…”.
Donc les deux premiers points sont : qu’est-ce que je soutiens (première phrase), et pourquoi je le soutiens, pourquoi c’est intéressant (deuxième phrase).
Si vous ne pouvez pas le dire, c’est là que vous allez bloquer. Comment écrire si vous ne savez pas quoi démontrer ?
– Éventuellement, on peut ajouter une troisième phrase : “le problème qui se pose est…”
À chaque début de chapitre ou même de section, il faut donc être en mesure de dire :
– Qu’est-ce que je soutiens ?
– Pourquoi je le soutiens ?
– Et quel est le problème qu’on va examiner ?
Si on est au clair, il faut pouvoir résumer sa thèse entière de cette manière. Par rapport à la thèse dans son ensemble, ça veut dire :
– Qu’est-ce que vous soutenez ? “Dans ma thèse je soutiens ça”.
– Pourquoi vous le soutenez ? “Parce que l’enjeu de ma thèse, c’est ceci”.
– Et quel est le problème ? “Le problème, c’est ça”.
En trois phrases, on a tout dit. 👏
Il rajoute plusieurs points sur le style de l’écriture : il faut être intelligible avant d’être intelligent.
Les génies sont incompris, mais ce n’est pas parce qu’on est incompris qu’on est un génie. Qui se sait profond s’efforce à la clarté, qui veut paraître profond aux yeux de la foule s’efforce à l’obscurité. Donc il faut viser la clarté et dire les choses sans détours.
Le style doit être direct et simple, il faut dire les choses sans détours. Le style doit permettre au lecteur de trouver ce qu’il cherche.
On n’écrit pas la thèse pour nous, on écrit la thèse pour qu’elle soit lue et comprise. Donc il faut être clair pour le lecteur qui veut comprendre la « thèse de la thèse ». Il faut écrire en fonction de ce que le lecteur cherche et ce que le lecteur cherche, c’est la réponse aux trois questions citées au-dessus.
"La thèse, c'est comme une enquête policière"
Il y a deux types d’enquêtes policières : Colombo et Sherlock Holmes. Dans Colombo, on sait qui est le coupable alors que dans Sherlock Holmes, on essaie de trouver qui c’est.
L’écriture de la thèse c’est plus Colombo que Sherlock Holmes. On doit déjà savoir le coupable – ce que vous allez démontrer. Dans Colombo, on regarde pour le plaisir de voir son raisonnement à l’œuvre finir par trouver le coupable, tout en sachant qui c’est. Il ne faut pas faire de mystère.
Et donc dans la thèse écrite, au début on dit clairement le coupable “je soutiens ceci”. Le lecteur se demande par la suite “comment vous en arrivez à penser cela”. Et tout le développement cherche à montrer comment on en est arrivé à soutenir une thèse particulière.
Celui qui va nous lire va le faire parce qu’on a déjà un coupable qu’on a clairement expliqué, et qu’il veut comprendre l’argumentation faite permettant de déterminer pourquoi ce coupable est le bon.
Quelles questions se posera le jury de soutenance de thèse ?
Le Professeur a été rapporteur dans de très nombreux jurys. Il dit que les questions que se pose un rapporteur sont :
– Qu’est-ce que soutient le candidat ? En gros quelle est son idée (une idée ça suffit).
– Comment il se positionne dans le champ de la recherche académique ? (Dans quel courant il s’inscrit, dans quelle théorie, dans quelle ligne théorique, on a besoin de le savoir d’entrée).
– Et quel est son apport ? (Qu’est-ce que la thèse apporte au débat académique dans le champ académique du sujet, quel est l’intérêt ?) En précisant l’enjeu et le problème de la thèse, on répond justement aux attentes du lecteur.
Quelle est la longueur d'une thèse ?
Avant de donner ses conseils, voilà un conseil personnel. Chaque thèse est unique, certes. Cependant, il faut partir d’une base. On peut par la suite l’amender, allonger une partie, réduire une autre. Mais s’approprier et adapter la structure d’une thèse doit se faire à partir d’une base solide, pas à partir de rien. Voilà la base solide décrite dans la vidéo.
Sa thèse, c’est 160 000 mots, 1 000 000 de caractères, espaces compris, avec les notes de bas-de-page.
Ça doit être le maximum.
Pour la lire, il faudra à une personne normale 9 heures de lecture. Pour un lecteur expert, il lui faudra 6h30 de lecture.
Pour avoir un repère, ça correspond à 333 pages de corps de texte (c’est-à-dire l’écriture de la thèse, en-dehors de la bibliographie, table des matières, sommaires, remerciements, listes d’abréviations, etc).
Au-delà de 330 pages de corps de texte, on ne lira pas la thèse. On peut faire une grosse thèse encyclopédique, mais on ne sera pas lu.
Il conclue avec ce conseil pour réduire la thèse : « si ce que je dis est écrit dans un manuel, je ne l’écris pas dans la thèse. J’écris l’idée et je renvoie au manuel ».
Comment construire le plan ?
C’est LA question. Souvent, la seule expérience qu’on a est celle des dissertations et des mémoires de recherche. Mais on sent que la thèse, c’est un autre niveau.
Le plan, dit-il, doit offrir de vrais repères (et souvent ce n’est pas le cas) 🧭.
Le plan est une carte qui permet de s’orienter dans le territoire de nos idées. Il permet de s’orienter dans une pensée.
Si on prend le plan de Paris, qu’est-ce qu’on attend? De comprendre les axes principaux, comment se déplacer, comment rejoindre les points d’intérêts, Ce qu’on attend du plan donc, c’est qu’il nous dessine les grandes directions. Et donc il faut que dans les titres, on comprenne ce qu’on va défendre.
Cela signifie que le plan ne doit pas être un plan d’idées, ça ne consiste pas à classer des idées.
Le plan ne consiste pas non plus à classer des thèmes, ça c’est une approche pédagogique de cours où on classe des thèmes pour les transmettre aux étudiants.
Le plan ne peut pas fonctionner par matière. La matière ici, c’est dans le sens « ce dont il est question, ce dont on traite ». Par exemple la matière d’un débat, d’un discours, d’un entretien, d’un reportage, d’un roman.
Donc par exemple la nature juridique des contrats, le régime juridique des contrats. La nature juridique et le régime juridique sont des matières, c’est ce dont on va traiter.
Ce n’est pas bon car ça n’explique pas ce qu’on défend. Ça ne parle pas du problème qu’on va aborder.
Donc du coup comment structurer ?
Le plan doit se structurer par problèmes.
Le plan, c’est notre problématique. On a dit que la problématique était une question compliquée, qui nécessitait qu’on la découpe en sous-problèmes. Et donc quels sont les sous-problèmes qui se posent, quelles sont les sous-questions ?
S’il y a 8 chapitres dans la thèse, ça veut dire que chaque chapitre doit correspondre à un problème. Le plan consiste alors à classer des problèmes pour qu’on puisse s’orienter dans la marche des problèmes, ce qu’on appelle la problématique. On revient à l’idée qu’on pose une question, un problème complexe en introduction. Que ce problème est tellement complexe qu’il faut le décomposer en sous-problèmes. Et ce sont ces sous-problèmes qui vont composer les chapitres.
C’est ça qui détermine le nombre de parties et chapitres 📚.
Le plan est structuré par problèmes. Le lien entre la problématique et les sous-problèmes composant chaque chapitre, c’est ce qui crée l’unité de notre pensée.
Vous avez 5, 6, 7, 8 problèmes que vous essayez de classer en deux ou trois parties, du mieux que vous pouvez. Mais il ne faut pas faire l’inverse, partir de la forme vide et essayer de la remplir.
C’est pourquoi si la problématique comporte 8 sous-problèmes, on fera 8 chapitres. Si la problématique contient 5 sous-problèmes pour y répondre, on fera 5 chapitres.
Alors pourquoi structurer le plan par problèmes ? Parce que de nouveau, seul un problème ouvre une discussion. On ne discute que de problèmes, donc c’est le problème qui ouvre le volume de discussion, qui nécessite un volume de démonstration.
C’est pourquoi ce ne sont pas les idées les plus importantes qui forcément vont se retrouver dans le plan. Dans le plan on a pas les idées les plus importantes, mais les idées dont on va discuter, ce qui est complètement différent.
Ce qu’on doit chercher dans le plan, c’est un équilibre des masses problématiques.
L’idéal du plan donc, le but qu’il faut atteindre c’est le suivant :
– Il faut qu’en lisant le plan, on comprenne les problèmes qu’on traite et les réponses qu’on a apportées.
Est-ce qu’il faut attendre d’avoir beaucoup d’idées avant de commencer ?
Quand est-ce qu’on commence à écrire ?
C’est comme un voyage, ça commence avec une destination, sinon c’est une errance (j’aime beaucoup sa formule ! 🤯).
On commence à écrire lorsqu’on sait ce qu’on veut dire. Dès qu’on a un but, un cap, on commence à écrire.
C’est pourquoi le plus important, c’est « qu’est-ce que je veux démontrer ? ». « Quelle est ma position ? ». « Quel est le but de la thèse ? ». « Qu’est-ce que je veux dire ? ».
Peut-être que vous n’avez pas tout le détail de l’argumentation, mais vous allez construire le chemin en marchant, donc ayez confiance dans votre propre puissance de problématisation et dans votre propre puissance de résolution des problèmes au moment où ils apparaissent. Si vous voulez aller de Paris à New-York et qu’un vol est annulé, ou qu’il faut prendre des correspondances, vous ne serez jamais perdu.e tant que vous connaissez votre cap : New-York. Il faudra éventuellement trouver des moyens alternatifs, mais ce n’est pas ça être perdu.e. C’est pourquoi ce qu’il faut, c’est ce cap.
Une partie du chemin peut donc se construire en marchant.
En conclusion : "La thèse doit être en mesure de dire ce que ça change dans la discipline"
Dans la thèse, il faut être en mesure de dire ce que ça change dans la discipline, dans le champ de l’analyse. Quel est son apport, que change la thèse ? C’est pourquoi on doit poser toutes les questions sur ce qu’on démontre et quel est l’enjeu.
Ça permet d’éviter que la thèse soit hors-sol. Si on pose un ensemble de questions théoriques mais jamais reliées à de la matière pratique, ce n’est pas bon. Car dans ce cas, où est l’enjeu, où sont les conséquences de votre travail, qu’est-ce que ça change ?
Si dans votre thèse, vous dites “je soutiens que”, il faut que cette thèse ait des conséquences sur l’analyse, sur la manière de concevoir le sujet, sur ce qu’on connaît déjà, etc.
Si ça ne change rien, la thèse n’a pas d’effets et si elle n’a pas d’effets, il n’y a pas d’enjeux à soutenir une proposition plutôt qu’une autre.
Mais cela n’arrivera pas si vous suivez tous ces conseils 😉
Téléchargez la liste complète des conseils pour (enfin) savoir comment rédiger
Les éléments les plus importants, de la structure d'un chapitre jusqu'aux attendus du jury de thèse.
Vous recevrez le bonus "Accélérer l’écriture de sa thèse en connaissant les attendus implicites".
J’ai commencé à rédiger ma thèse il y a environ 2 mois et j’ai bien l’impression que je vais dépasser les 333 pages 😅 est-ce qu’il y a une limite à ne pas dépasser ? Parce que dit comme ça, ce conseil des « 330 pages de corps de texte » je n’ai pas l’impression que ça va fonctionner dans mon cas, à moins de développer à peine (je suis en sociologie si ça peut aider).
Tout d’abord félicitations pour ce début de rédaction ! Je comprends pourquoi vous avez posé une question sur les définitions dans l’article sur le cadre théorique ! 🙂 Le conseil des 333 pages de corps de texte est un guide important et il faut comprendre dans quel sens il le dit. Le but est de relever plusieurs points :
– Une thèse trop longue risque de ne pas être lue. Ça aide à aller contre la tentation de faire une thèse de plus de 600 pages pour montrer une connaissance encyclopédique. Trop long, ce n’est pas ce qu’un jury attend.
– Ensuite, il insiste sur la concision parce qu’il donne des techniques pour réduire le volume. Si une source peut être expliquée en une ligne et citée, il faut le faire plutôt que de reformuler la source sur plusieurs paragraphes. Le but est de réduire au maximum les explications excessives qui n’apportent à la thèse que du volume, sans amener beaucoup de vraies informations.
Bien entendu, une thèse peut faire 400 pages ou 450 pages. Ce qui va permettre de faire la différence entre « trop » longue et très longue, c’est de porter son attention sur deux points :
– Est-ce que cette longueur est justifiée par la qualité des informations données ? Si on peut faire plus court en enlevant certaines répétitions dans ses démonstrations, en donnant un exemple au lieu de deux, etc, la longueur n’est pas justifiée.
– Est-ce que cette longueur est justifiée par mon sujet ? Là c’est lié à votre méthode de collecte de données pour traiter votre sujet. Par exemple, certaines thèses en Histoire ou Sociologie demandent de collecter énormément de données, mais c’est justement parce qu’il y a beaucoup de données que le travail va être long.
Si vous avez une autre question n’hésitez pas !
Merci pour cet article ! Reste plus qu’à appliquer lol
C’est certain ! J’aime l’idée qu’avec l’aide de ces conseils, on a une direction claire et qu’on peut consacrer son énergie créative à la rédaction plutôt qu’à comprendre quoi faire 🙂
Je suis pas sure d’avoir compris ce que c’est le plan idées ou le plan matière ..?
Bonjour ! Souvent quand on construit un plan, on se dit qu’on va tenter de prendre nos meilleures idées et de structurer tout notre développement autour de ça. Chaque « bonne idée » sera un chapitre ou une section. Le problème avec ce « plan à idées », c’est que l’enjeu de la thèse c’est de résoudre une suite de questionnements, ou de problèmes. Et donc c’est une meilleure logique démonstrative d’enchaîner les problèmes qu’on résout, parce que les très gros problèmes sont ceux qu’on va traiter dans une partie, on va les découper en « gros problèmes » pour en faire des chapitres, puis on va encore les découper pour en faire des sections, etc. Alors qu’une bonne idée, elle peut aussi bien être résumée en un paragraphe qu’en 20 pages. Et surtout, les bonnes idées ce sont les conclusions d’une démonstration, pas la démonstration en elle-même. C’est pour ça que que structurer son plan sur la base d’idées plutôt que de problème, ça conduit à ces soucis là.
Le plan « matière » c’est pareil. Une matière, c’est littéralement « ce dont on parle », donc des catégories un peu générales. Comme pour le plan à idées et pour les mêmes raisons, le but reste de construire son plan sur des problèmes qu’on va résoudre. Pas sur des idées intéressantes, ni sur des sujets un peu larges qu’on va enchaîner dans le cas du plan-matière.